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Fiche


Le jeu de balle à main en Wallonie

Les origines de la balle pelote remontent au Moyen-Age. A cette époque, les « jeux de paume », jeux de balle se jouant en plein air (longue paume, à mains nues) ou dans un espace fermé (courte paume, avec ustensile de frappe) sont pratiqués. La balle pelote dérive du jeu de longue paume, plus populaire que la courte paume. Ce jeu est plus qu'un sport, c'est un réel patrimoine.

Toutes les informations sur La Balle pelote

À l'heure actuelle, la balle pelote est pratiquée dans les provinces de Hainaut, de Namur et du Brabant wallon. Les deux principales régions concernées – ou sous-régions – sont la Wallonie picarde et le namurois (Condroz, Hesbaye namuroise et vallée de la Meuse).

 

Communauté concernée (groupes ou individus)

  • Un premier niveau est constitué par les joueurs – adultes et jeunes – regroupés au sein de sociétés, elles-mêmes affiliées à une fédération. En 2023, le nombre de sociétés s'élève à 132, pour un nombre total de 3128 pratiquants.
  • Le deuxième niveau de la communauté concernée est constitué par les sociétés. A l'échelle d'un village ou d'une localité, une société de balle pelote patronne une ou plusieurs équipes de cinq joueurs, adultes ou jeunes. A leur côté, la société comprend également les dirigeants ou membres du comité. Aussi indispensables que les joueurs et arbitres, les membres de comité ou dirigeants occupent une place prépondérante dans le monde ballant, où la notion de bénévolat reste la norme.
  • Le troisième niveau de la communauté concernée est celui de la fédération. Dénommée actuellement Fédération des jeux de paume Wallonie-Bruxelles (FJPWB) – un nom générique reprenant plusieurs disciplines sœurs, dont la principale est la balle pelote –, celle-ci regroupe les différentes sociétés présentes sur le territoire wallon. Une seconde fédération fait de même pour les régions flamandes. Ces deux fédérations unilingues sont regroupées sous une structure faîtière dénommée Nationale kaatsbond – Fédération nationale des jeux de paume (NK-FNJP).
  • Le quatrième niveau est constitué par le public de la balle pelote. Ici aussi, une distinction doit s'opérer afin de caractériser le plus précisément possible différents groupes d'amateurs. En jeu de balle, plus que dans d’autres disciplines peut-être, public et joueurs appartiennent à un même monde, un univers dont ils connaissent le langage, les codes et dont ils véhiculent les valeurs. A une époque où le jeu de balle constitue le seul délassement de la localité – c'est encore souvent le cas durant l'entre-deux-guerres –, le public concerné coïncide avec l’ensemble de la communauté. Toutes les catégories de la population, notables en tête, soutiennent les joueurs issus, majoritairement, de la localité Le jeu de balle est l’occasion de défendre les couleurs locales, à l’échelon régional, voire national.
  • Un cinquième et dernier niveau concerne les acteurs économiques nécessaires à la pratique de la balle pelote. A cet égard, il existe en effet une série d'intervenants, très limités en nombre. Au premier rang, figurent les fabricants de gants, des artisans du cuir dont le savoir-faire est proche de celui du cordonnier. Ceux-ci conçoivent des gants adaptés à la morphologie de chaque joueur. Jusqu'il y a quelques décennies, la fabrication des balles en peau constituait en soi un artisanat spécifique, faisant vivre plusieurs familles du village d'Ham-sur-Heure. Dès la fin des années 1960, la traditionnelle balle en peau, héritière de l’esteuf médiéval, sera remise en question, pour être complètement abandonnée quelques années plus tard, en 1973, au profit d’une balle synthétique. Ce changement, à l’origine de nombreuses discussions et polémiques, est motivé par plusieurs raisons, dont la principale est le coût de fabrication élevé de la balle en peau. Plusieurs types de balle synthétiques se sont succédé. Depuis 2018, la balle en plastique est fabriquée par la société Serviplast, à Rochefort.

Société ou groupe responsable

Fédération des jeux de paume de Wallonie-Bruxelles

La balle pelote, essai de définition

La balle pelote met en présence deux équipes de cinq joueurs, munis d'un gant de cuir permettant de frapper la balle. Si le comptage des points est quasiment identique à celui du tennis – les deux disciplines appartiennent à la famille des jeux de paume –, la balle pelote se distingue par le principe du gagne-terrain – la chasse –, consistant à faire mourir la balle le plus loin possible dans le camp de l'adversaire. Dans la région frontalière de Maubeuge, les Français nomment cette discipline jeu de paume, soulignant ainsi sa filiation avec la longue paume médiévale. La balle pelote a longtemps voisiné avec la (petite) balle au tamis, une discipline sœur qui se distingue par l'emploi d'un gant et d'une balle sensiblement différents ainsi que d'un accessoire appelé tamis, servant à faire rebondir la balle lors de la livrée. Terme générique, jeu de balle désigne indistinctement la balle pelote et la balle au tamis.

Si l’on s’en tient à une définition classique, selon laquelle le jeu est une « activité purement gratuite, qui n’a d’autre but que le plaisir qu’elle procure », la balle pelote doit être qualifiée de jeu, un jeu extrêmement populaire eu égard au succès qu'il rencontre parmi les différentes couches de la société. Jusqu'à l'extrême fin du XIXe siècle, le jeu de balle se pratique selon des modalités variables, d'un contexte régional à l'autre, au gré de règlements à portée locale. Parmi ces gestes posés quotidiennement et transmis par la tradition, il fait partie d’un décor aux traits immuables.

C'est à l'aube du XXe siècle que le passage du statut de jeu à celui de sport se pose pour la balle pelote. Au regard des traits constitutifs du sport – une activité physique nécessitant effort et entraînement, soutenue par un esprit de jeu et de compétition, selon des règles communément admises –, le jeu de balle peut être qualifié de sport dès le moment où son organisation se structure et sa pratique s'uniformise. C'est le cas en 1902, lorsque, dans la foulée de la balle au tamis, la balle pelote se dote d'une fédération. A l'échelle belge, la balle pelote constitue un très bon exemple de transition entre le jeu traditionnel et le sport institutionnalisé.

Jeu devenu sport, la balle pelote est pourtant volontiers qualifiée de folklore dans le langage courant. Si l'on s'en tient à son acception la plus noble, le folklore désigne un ensemble de pratiques émanant d’une communauté culturelle donnée, portées par une tradition transmise de génération en génération. C’est assurément le cas du jeu de balle dans certaines zones de Flandre, de Wallonie et, il y a quelques années encore, à Bruxelles. Afin d'éviter la connotation péjorative d'un terme folklore trop souvent galvaudé, il est courant de placer la balle pelote dans la catégorie des traditions populaires, une façon de mettre en avant son enracinement communautaire et temporel. Aujourd'hui, et même si elle doit encore s'imposer dans le vocabulaire commun, la notion de patrimoine culturel immatériel désigne ces pratiques sociales traditionnelles bien vivaces – certains parlent de patrimoine vivant –, telles que la balle pelote. Jeu traditionnel, sport à part entière et patrimoine culturel immatériel, la balle pelote combine à la fois ces trois dimensions. Une richesse incontestable, certes, qui, paradoxalement, provoque une confusion certaine dans sa lisibilité et sa perception.

L'aire de jeu de la balle pelote

Le ballodrome ou jeu (de balle) est constitué de deux surfaces accolées, le petit jeu ou rectangle et le grand jeu ou trapèze. Le ballodrome pour adultes a une longueur de 72 mètres. Les lignes des outres et des courtes sont perpendiculaires à l’axe du ballodrome, qui divise celui-ci en deux parties égales et symétriques. Les lignes des outres sont situées aux deux extrémités du jeu et dotées de perches, tandis que celle des courtes sépare le trapèze du rectangle. Le jeu est muni d’un tamis, une surface rectangulaire tracée dans l’axe du ballodrome, mesurant cinq mètres de long et trois mètres de large et dont une des largeurs se confond avec la ligne des outres du trapèze.

La surface du ballodrome varie du tout au tout et là aussi ne connaît pas de règle. Traditionnellement, à côté des ballodromes pavés qui constituent la norme, l’on retrouve des terrains en terre battue ou en cendrée. Il arrive aussi que l’on joue sur du gravier, voire sur une prairie. Pourtant, cette diversité appartient à une époque aujourd’hui révolue. Car la généralisation du béton, puis de l’asphalte, modifiera considérablement cet état des lieux. A l’heure actuelle, l’immense majorité des ballodromes connaissent un revêtement uniforme de qualité.

Un ballodrome n'est pas un stade. Pour la balle pelote, peu de traces spectaculaires ou remarquables. Son infrastructure est légère, voire éphémère. En plus des lignes délimitant le jeu, elle comprend quatre perches installées en vue des luttes. Lors des rencontres, des bancs sont placés autour du jeu. Dans certains cas – en ville, principalement –, des bâches ceinturent l'aire de jeu. Leur fonction est double : empêcher les balles d'occasionner des dégâts aux biens et personnes, tout en exigeant des amateurs un indispensable droit d'entrée. Le ballodrome est doté d'un marquoir, mobile le plus souvent, destiné à matérialiser le comptage des points et jeux. Qui dit infrastructure légère, dit aussi que le jeu de balle doit laisser la place aux autres activités de la voie publique, une fois la lutte terminée. Ainsi, en dehors des rencontres ou lors de la saison morte, les lignes délimitant l'aire de jeu sont les seules caractéristiques visibles du terrain. Tracées à la peinture ou à la chaux, elles sont matérialisées par des cordes lorsque le revêtement est constitué de terre battue ou de cendrée.

Principes de jeu et règles de la balle pelote

Comme nous l'avons vu, une lutte de balle pelote met en présence deux équipes de cinq joueurs. L’équipe à la livrée prend possession du trapèze, tandis que son adversaire se place dans le rectangle.

La composition des équipes et les actiosn de chacun sont à lire dans le DOSSIER COMPLET, ci-contre.

La chasse, un filet imaginaire

Comme nous venons de le voir, à côté des balles outres, courtes ou mauvaises, donnant directement un point (quinze) à l’une des deux équipes, le principe de la chasse constitue la grande particularité du jeu de balle. En effet, contrairement au tennis, la balle qui fait plus d’un bond ou roule sur le terrain ne doit pas être considérée comme morte. En balle pelote, elle continue sa trajectoire jusqu’au moment où elle est stoppée par un joueur qui vient à sa rencontre ou qu’elle sort des limites du terrain (on dit alors qu’elle décorde). Dans ces deux cas, l’arbitre marque d’un trait de craie l’endroit où la balle a arrêté sa course. Celui-ci est alors désigné par un élément visuel, le rappel de chasse.

Lorsque les différents échanges ont produit deux chasses, les chasses 1 et 2 (après une seule lorsque l’on est à quarante partout), les joueurs changent de camp. L’équipe qui occupe le trapèze passe dans le rectangle et inversement.

Une fois ce changement de côté effectué, l’on va jouer cette première chasse (chasse 1). Jouer la chasse signifie que les deux équipes vont chercher à remporter cette chasse, afin de gagner un quinze. La chasse n’est donc pas un point, mais une étape intermédiaire dans la conquête d’un point…

Le principe de la chasse est le suivant. Cette chasse 1 est en quelque sorte une ligne, un filet imaginaire, qui se trouve donc à l’endroit où, à la phase précédente, la balle a terminé sa course. Le terrain où l’on s’apprête à livrer est maintenant divisé par ce nouveau filet. Pour remporter le quinze, l’équipe à la livrée devra faire mourir la balle au-delà de cette chasse 1, autrement dit au-delà de cette ligne. L’équipe à la frappe devant, quant à elle, l’en empêcher en essayant de faire mourir la balle dans la partie de terrain occupée par l’équipe à la livrée. L’équipe qui remporte la chasse 1 se voit alors attribuer un quinze. Une fois que l’on a joué cette chasse 1, l’on peut alors passer à la seconde (chasse 2). Celle-ci sera disputée selon le même principe.

Les points sont comptés comme suit : 15, 30, 40, jeu. Il s’agit du même procédé que celui en vigueur au tennis, à ceci près que l’avantage après 40 partout n’existe pas en balle pelote. Le gain de quatre quinze rapporte un jeu. En championnat, l’équipe qui arrive la première à 13 jeux remporte la lutte.

  • Pratiques sociales, fêtes

Modes d’apprentissage et de transmission

Traditionnellement, la transmission de la balle pelote se fait par imitation, émulation ou incitation au sein du milieu familial. Transmise de père en fils ou d’oncle à neveu, la passion du jeu donne naissance, souvent, à des fratries de joueurs. Il arrive également qu’un père et un fils figurent dans la même équipe. C’est ainsi que José Letroye, l’un des plus grands joueurs des années 1960 et 1970, sera champion de Belgique au côté de son coéquipier de père, Norbert. Plus près de nous, Benjamin Dochier remporte le titre suprême en 2004 avec l’équipe de Neuville, dans laquelle figure son père Francis.

Ce schéma traditionnel de transmission se retrouve au niveau d'une même localité. C'est particulièrement le cas dans les villages ou villes où le poids de la balle pelote est très présent. A cet égard, le milieu scolaire joue un rôle prépondérant. Dans de nombreux cas, les instituteurs encouragent et encadrent la pratique de la balle pelote dans les cours de récréation, formant des viviers de jeunes joueurs, appelés alors à intégrer une société locale. A Ottignies, la figure de Jean Demeester, dirigeant de la société des Bruyères, est l’exemple type du dévouement de quelques passionnés. Instituteur en chef de l’école des Bruyères, il n’eut de cesse d’encourager la pratique du jeu de balle à ses élèves, pour le bonheur de sa société, pépinière de jeunes talents pendant des décennies. Dans les années 1980, la société de WELAR constitue elle aussi un très bon exemple de l'importance du milieu scolaire dans la transmission de la balle pelote. Elle est issue de l'association entre deux entités, Wannebecq Espoir et Lessines Athénée royal, une société de jeunes créée au sein même de l'école par deux enseignants passionnés.

Personnes / organisations impliquées dans la transmission

Depuis 1952, année de sa création, le Groupement national des jeunes, structure créée au sein de la fédération, a donné une impulsion à la formation, de plus en plus structurée et encadrée, des jeunes pelotaris. A partir de cette époque, certaines organisations, comme le réputé grand prix national des minimes de Mignault, attirent autour du ballodrome plusieurs centaines de spectateurs.

Grâce au travail du Groupement national des jeunes et des différentes structures fédérales qui lui ont succédé, un encadrement structuré prend le relais du schéma traditionnel de transmission par imitation, émulation ou incitation évoqué ci-dessus. Désormais, la pratique informelle de la balle pelote dans la rue, sur la place publique ou dans la cour de récréation ne suffit plus. Pour survivre face à des contraintes et des menaces de plus en plus présentes, la balle pelote s'organise afin d'espérer assurer sa pérennité. A cet égard, et à l'instar des autres sports, la balle pelote recourt à un système d'entraînements en semaine, en vue des championnats organisés le week-end. Pour ce faire, des entraîneurs – joueurs ou anciens joueurs – encadrent la formation des catégories de jeunes au sein des sociétés. Comme nous le verrons ci-après, depuis la reconnaissance de la balle pelote par l'ADEPS, une formation spécifique est donnée aux entraîneurs par la cellule Recrutement et formation de la fédération . L'objectif est de leur donner les outils pédagogiques et méthodologiques les plus appropriés à la transmission de la balle pelote

Transmission et éducation

A l'heure actuelle, à côté de championnats pour catégories de jeunes (pré-pupilles, pupilles, minimes, cadets), organisés sur la même base que les luttes hebdomadaires pour adultes, la fédération organise plusieurs journées d'initiation tout au long de l'année. Celles-ci ont pour but, in fine, d'amener de nouveaux joueurs dans les équipes de jeunes . A cet égard, si la formation au sein des sociétés a longtemps été confiée à la bonne volonté d'un ancien joueur, celle-ci est aujourd'hui prise en charge par des formateurs qualifiés, titulaires d'une certification de « moniteur sportif animateur jeux de paume et/ou « moniteur sportif initiateur jeux de paume ». Comme nous le verrons dans la suite de ce dossier, et comme illustré en détail en annexe, la formation de ces moniteurs est assurée par la fédération, grâce à une cellule Formation et recrutement soutenue par l'ADEPS. A cet égard, un subside annuel de 10 000 € est dédié aux moyens de fonctionnement de cette cellule.

Identification, documentation, recherche

Depuis une vingtaine d'années, plusieurs chercheurs ou historiens locaux se penchent sur le monde de la balle pelote. A côté d'ouvrages mettant en valeur la pratique du jeu de balle dans une région ou une localité déterminée (le Borinage, Morlanwelz, Courcelles), il faut mentionner des publications désireuses de contextualiser la balle pelote à une plus large échelle.

Si ces ouvrages permettent une certaine valorisation du patrimoine de la balle pelote, ils assurent surtout la collecte, l'identification et la numérisation de nombreuses ressources iconographiques. Dans ce domaine, il faut épingler le vaste travail documentaire du photographe Andy Simon, par ailleurs actuel président de la FJPWB. Signalons également la réalisation de travaux dans le cadre d'études universitaires. Le dernier a été mené en 2023 par Chloé Decerf, étudiante en communication à l'Université de Liège.

Dans ce registre de la documentation et de la recherche, nous devons évoquer le travail du Musée national des jeux de paume et de la balle pelote, dont la vocation première est de sauvegarder un large patrimoine relatif au monde du jeu de balle. Ainsi, à côté de plusieurs milliers de photographies, on y retrouve trophées, gants, balles, équipements, datant pour certains de la fin du XIXe siècle. Si le musée bénéficie d'une bibliothèque et d'un embryon de centre de documentation, son équipe cherche à se professionnaliser afin d'apporter une réponse satisfaisante aux exigences des chercheurs.

Communication, sensibilisation

Depuis quelques années, la fédération de la balle pelote communique essentiellement via le réseau social Facebook. Cette communication consiste à informer sa communauté – joueurs, dirigeants, amateurs – des organisations mises sur pied ou soutenues par les instances fédérales. A côté de cette communication que l'on pourrait qualifier d'interne, la fédération cherche également à sensibiliser un large public, peu ou pas concerné par la pratique de la balle pelote. Dans ce registre de la communication externe ou de la sensibilisation, plusieurs capsules promotionnelles ont été conçues. Destinées avant tout à un jeune public, potentiellement intéressé par la pratique du jeu de balle, elles cherchent à souligner l'attractivité et la modernité de la discipline. A travers elles, c'est une pratique éminemment sportive qui est mise en avant, caractérisée par la dextérité, la vitesse de déplacement, la souplesse ou la force physique des joueurs.

Toujours avec cette volonté de promouvoir une discipline en déficit d'image, la fédération cherche à organiser des luttes à l'accès gratuit dans des endroits attractifs, depuis longtemps délaissés par la balle pelote. C'est ainsi que le Grand-Place de Soignies ou celle de Mons a servi de cadre à des luttes en 2022 et 2023. L'objectif avoué de ces manifestations est de faire (re)découvrir la balle pelote à un public qui ne la connaît que très peu ou mal.

La médiatisation de la balle pelote est une problématique d'une grande complexité. Si la discipline fait l'objet d'une importante couverture presse il y a encore quelques décennies encore, celle-ci appartient désormais au passé. A de très rares exceptions près, les médias nationaux – presse écrite et audiovisuelle – passent totalement sous silence les compétitions de balle pelote. L'exemple du journal Le Soir est à cet égard le plus criant. Après avoir sponsorisé l'un des plus importants tournois du pays – le tournoi du Sablon, jusqu'en 1973 –, Le Soir ne publie plus les résultats de balle pelote depuis une vingtaine d'années. Plus récemment, le journal La Dernière Heure – Les Sports, titre qui couvrait très largement le jeu de balle il y a une dizaine d'années encore, a décidé de ne plus ouvrir ses colonnes à la balle pelote. A l'heure actuelle, seul le groupe Vers l'Avenir continue à suivre en détail les différents championnats et tournois. Au niveau audiovisuel, No-Télé, télévision de la Wallonie picarde, est le seul média à couvrir la balle pelote sur base de reportages et d'émissions hebdomadaires.

Les raisons avancées par les médias afin de justifier ce désinvestissement tournent toujours autour de l'audience insuffisante générée par le jeu de balle. Du côté de la fédération de la balle pelote, on insiste a contrario sur l'indispensable visibilité médiatique afin de relancer un intérêt populaire pour la discipline.

Au sein d'un monde de la balle pelote aux prises avec une société en voie de complète mutation, la communication et la sensibilisation ont pris un nouveau visage ces dernières années. La fédération, consciente de l'importance de rester connectée à sa communauté et de conquérir de nouveaux adeptes, a entrepris une transformation digitale. Pour ce faire, en 20023, elle a approché des agences de marketing et de création digitale. Cette démarche vise à améliorer de manière significative le taux de conversion, la fidélisation et les affiliations dans le cercles de balle pelote.

L'ère numérique a ouvert de vastes horizons pour la communication de la fédération. Facebook et mailings seront désormais rejoints par une stratégie de communication globale qui sera dévoilée lors de la saison 2024. La fédération a choisi de miser sur des mots-clés qui résument l'essence même du jeu. Parmi ceux-ci : l'authenticité, la singularité et la tradition. Cette approche stratégique, couplée à une collaboration avec des illustrateurs, vise à susciter l'intérêt des nouvelles générations pour la discipline.

A travers ses futures stratégies de marketing et les initiatives mises au point pour attirer de nouveaux affiliés, la fédération cherche à inverser la tendance actuelle. A cet égard, le déclin qui touche la discipline peut être vu comme une opportunité de réinventer la façon dont on parle de la balle pelote afin de lui permettre de reprendre un souffle nouveau. Dans ce registre de la communication, de nombreux cercles se lancent également dans le développement de leur propre communauté grâce à leurs réseaux sociaux, cherchant ainsi à toucher une audience plus locale que la fédération ne peut atteindre. Certains sociétés disposent de sites internet très actifs. C'est le cas de Thieulain, Montrœul ou encore Montignies-lez-Lens.

Actions de valorisation à signaler

A côté de ses missions de sauvegarde, d'identification et de conservation de nombreuses ressources documentaires, le Musée national des jeux de paume et de la balle pelote doit être considéré comme un outil de sensibilisation et de valorisation de la balle pelote. A l'occasion de différentes journées portes ouvertes et de visites guidées, il essaie d'attirer des groupes de visiteurs totalement étrangers à la discipline. Depuis une vingtaine d'années, le musée athois a permis à plus de 20 000 visiteurs de re)découvrir le monde du jeu de balle.

Dans ce registre de la valorisation patrimoniale, la Maison du Roi, musée de la la Ville de Bruxelles, accueillera pendant l'été 2025 une exposition consacrée à la place du jeu de balle dans la vie bruxelloise. Conçue autour de la riche collection de trophées du musée, parmi lesquels une quinzaine de balles d'argent du XIXe siècle jamais étudiées à ce jour, cette manifestation constitue une très belle opportunité de sensibilisation et de médiatisation.

Toujours dans ce domaine de la valorisation culturelle, nous devons signaler les publications déjà évoquées plus haut, consacrées à la mise en évidence de la richesse patrimoniale du jeu de balle dans différentes régions du pays. Ajoutons à cette dimension de vulgarisation, les nombreuses conférences données sur le sujet depuis une vingtaine d'années.

Dans ce registre de la sensibilisation et de la valorisation, et comme évoqué plus haut, la fédération cherche depuis quelques années à programmer une séries de rencontres dans des endroits grand public. En 2022 et 2023, la Grand-Place de Soignies et la Grand-Place de Mons ont accueilli des luttes, dont l'objectif premier était d'apporter une plus-value de visibilité. Gratuites, ces organisations devaient permettre à un « non-public » de suivre les luttes.

En vue de son édition 2024, le Tournoi du Tilburck, à Braine-le-Comte, a décidé de lancer une formule innovante. Désireuse d'attirer de nouveaux spectateurs, bien au-delà du public captif traditionnel, l'équipe organisatrice formera des « ambassadeurs de la balle pelote ». Munis d'un tee-shirt reconnaissable, ces ambassadeurs chercheront à donner les clés de compréhension nécessaires (règles du jeu, tactique, dimension historique et culturelle) aux nombreux visiteurs (enfants des plaines de jeux, familles, amis) que les organisateurs espèrent attirer lors de ce tournoi portes-ouvertes.

Modes de reconnaissance publique

Hormis la reconnaissance de la balle pelote par l'ADEPS, la discipline ne fait pas l'objet d'un autre type de reconnaissance publique.

A cet égard, s'il n'existe pas encore à ce jour de réelle politique de préservation d'aires de jeu à caractère patrimonial, de très rares cas de sensibilisation existent. C'est le cas à Wihéries ou à Watermael-Boitsfort, où deux places publiques ont été dotées d'un panneau visant à expliquer la vocation sportive passée du site. En Brabant wallon, à Tourinnes-la-Grosse, le ballodrome en terre battue est intégré depuis peu au périmètre de protection entourant l'église Saint-Martin, édifice classé comme patrimoine exceptionnel de Wallonie.

  • Dialogue intergénérationnel

Comme évoqué dans le paragraphe Transmission et éducation du point IV. 2. Mise en valeur et mesure(s) de sauvegarde existante(s), la transmission naturelle des savoirs et savoir-faire au sein de la cellule familiale ou à l'échelle communautaire ne suffit plus au renouvellement des pratiquants. La sensibilisation et la formation des jeunes joueurs passent aujourd'hui par la fédération et les sociétés. Au sein de celles-ci, les moniteurs – brevetés ou non – sont tous des anciens joueurs désireux de pérenniser leur discipline.

Si la transmission a longtemps été empirique, elle se base de plus en plus sur une méthodologie et des compétences accrues et s'appuie en cela sur le travail de la cellule Formation et recrutement de la fédération. Le dossier de reconnaissance introduit par la fédération de balle pelote auprès de l'ADEPS, formalisé ensuite en un cahier des charges reprenant la méthodologie et les outils nécessaires à la formation des moniteurs et/ou initiateurs, prouve à l'envi cette professionnalisation de l'encadrement.

Si la balle pelote doit essayer d'élargir son audience en travaillant notamment avec le milieu scolaire, son public cible reste localisé au sein de quelques régions où la balle pelote conserve une visibilité certaine. Dans ce contexte, la transmission familiale – et donc intergénérationnelle – joue un rôle prépondérant. Force est de constater que les jeunes joueurs ont quasiment tous un lien familial avec un joueur ou ancien joueur.

Au-delà de la formation au sens strict, il existe également une transmission d'une culture de la balle pelote. Celle-ci comprend l'acquisition des règles du jeu, d'un vocabulaire ou d'expressions idiomatiques particulières. Cette transmission intergénérationnelle informelle, si elle n'élargit pas à strictement parler la base des joueurs, permet un renouvellement indispensable au niveau de la communauté (public et audience).

  • Dialogue multiculturel

Dès le début du XXe siècle, la balle pelote a tenté des rapprochements avec les jeux voisins. En 1899, des joueurs belges se rendront en Frise et s’essayeront au jeu frison, alors qu’une équipe néerlandaise rencontrera, au jeu de balle pelote, la délégation belge. De cette époque, datent des visites régulières de délégations de joueurs belges de pelote en terre frisonne. Les rencontres entre Belges et Français auront lieu dès le début du XIXe siècle. Ces contacts sont bien sûr facilités par la pratique d’un jeu commun.

Les contacts entre jeux belge, français et néerlandais prendront une tout autre ampleur avec la création, le 13 mai 1928, de la Confédération internationale du jeu de balle pelote-paume (CIBPP). Cet organisme est alors constitué de la Fédération nationale du jeu de paume française (FNJP), de la Koninklijke nederlandse kaatsbond (KNKB) et de la Fédération royale nationale de balle pelote belge (FRNP). Le but de cette confédération est d’assurer la propagande des jeux de pelote-paume et d’obtenir sa participation aux Olympiades. La CIBPP est chargée de la mise sur pied d’épreuves internationales. Elle organise à partir de 1928 un tournoi triangulaire entre sélections belge, française et néerlandaise. La première édition de cette manifestation se déroulera à Namur. En 1930, l’édition organisée au Sablon, à Bruxelles, devant plusieurs millier de spectateurs, prendra le nom quelque peu exagéré de Championnat du monde…

A l’aube de ce XXIe siècle, et après s’être abstenue de contacts pendant une douzaine d’années, la Belgique reprend progressivement sa place dans le concert international des jeux de paume. Il ne s’agit plus ici des traditionnels tournois triangulaires avec ses voisins français et néerlandais, mais d’une participation à une internationale beaucoup plus large de jeux de balle. Depuis une vingtaine d'années, la Belgique participe au championnat d’Europe et au championnat du monde des jeux de paume. Une équipe nationale, formée des meilleurs pelotaris du royaume, rencontre pour l’occasion ses homologues européennes ou sud-américaines, dans diverses disciplines. Parmi celles-ci, le jeu dit international, un compromis entre les différentes façons de jouer de chaque pays ainsi que le llargues, jeu pratiqué dans la Communauté valencienne, en Espagne.

A côté de ces relations entre fédérations nationales, ayant comme objectifs l’organisation de rencontres internationales et le rapprochement des différentes formes de jeu, les rapports se concrétisent aussi par la participation d’équipes françaises au Championnat de Belgique. Actuellement, elles sont au nombre de trois.

A l'échelon belge, la balle pelote telle que pratiquée en Fédération Wallonie-Bruxelles est en contact régulier avec la Région flamande, puisque les équipes néerlandophones et wallonnes se rencontrent chaque semaine dans les deux divisions supérieures. Par ailleurs, plusieurs joueurs flamands renforcent des équipes wallonnes, tandis que leurs homologues wallons font de même en Flandre. Signalons également la présence de cinq joueurs wallons au sein de l'équipe française de Maubeuge, vice-championne de Belgique de balle pelote en 2023.

A l'échelon de la Wallonie picarde et dans un tout autre registre, celui du dialogue entre formes de patrimoine, la balle pelote est intimement liée à un autre élément patrimonial emblématique. A Isières, commune d'Ath, les géants locaux, le Grand Mitan, le Marqueu d'Caches et le Délégué incarnent trois figures essentielles du monde ballant. Durant la ducasse locale, ces géants montent sur le ballodrome, accompagnés de la fanfare, à l'occasion de la lutte organisée pour l'occasion.

A Ladeuze, toujours en Wallonie picarde, un autre géant dénommé Eul Gauché représente un joueur de balle. Depuis 2019, en raison de l'arrêt de la ducasse locale, ce géant n'a plus l'occasion de sortir. Signalons également que le village français de Marchiennes, à quelques encablures de la frontière belge, s'est récemment doté d'un géant nommé Pelotin, en hommage au jeu de balle jadis si populaire dans la localité, démontrant ici aussi la proximité de ces deux phénomènes patrimoniaux.

Si, traditionnellement, la langue véhiculaire de la balle pelote est la langue endogène, il est logique que le jeu de balle soit fortement représenté sur la scène littéraire et théâtrale régionale .

  • Egalité homme/femme

Si la pratique féminine de la balle pelote existe, elle reste pour l'instant confidentielle. Des équipes et un championnat féminins ont existé par le passé. C’est au cœur des années 1970 que les premières compétitions féminines verront le jour, de façon très éphémère. Il faudra attendre 2001, et l’institution de la Commission de promotion du sport féminin de la Fédération wallonne amateur de balle pelote, pour voir une pratique féminine structurée. Un embryon de championnat se jouera autour de quelques équipes namuroises, parmi lesquelles Aisemont, Belgrade, Meux, Moignelée et Beuzet. Avec la disparition de la Fédération wallonne amateur de balle pelote il y a une dizaine d'années, cesse alors la pratique organisée de compétitions féminines. Aujourd'hui, les rares joueuses pratiquent leur discipline avec leurs condisciples masculins, la faute à des effectifs suffisamment étoffés pour permettre la création de championnats féminins

A l'heure actuelle, la FJPWB souhaite favoriser la pratique féminine. Pour ce faire, elle a créé en 2023 un groupe de travail dénommé Ethique, inclusion et féminisation. A très court terme, son objectif est de se pencher sur ces questions prioritaires et de répondre au mieux aux attentes légitimes en la matière. Signalons que des initiatives concrètes visant à une féminisation accrue de la balle pelote existent au sein de certaines sociétés. Ainsi, en Wallonie picarde, une équipe féminine adulte est active au sein de la société de Bassilly. Elle organise régulièrement des séances de sensibilisation destinées à un large public. Les membres de cette équipe féminine sont bien souvent compagnes, sœurs ou filles de pelotaris, quand il ne s’agit pas de jeunes femmes ayant pratiqué, naguère, la balle pelote dans les équipes de jeunes… masculines.

Au niveau de l'organigramme de la fédération, de nombreuses femmes sont actives au sein des instances décisionnelles. C'est aussi le cas dans les sociétés, où la présence féminine est significative. Notons enfin que les joueurs de balle pelote ont l’occasion d’être dirigés par une arbitre, et ce au plus haut niveau de la hiérarchie.

  • Lutte contre le racisme et la xénophobie

Si la fédération de balle pelote est bien évidemment très attentive au respect des différentes identités et origines, elle ne semble pas avoir été confrontée à des cas concrets de discrimination.

  • Développement durable

Andy Simon, président de la Fédération des jeux de paume Wallonie-Bruxelles, souhaite sensibiliser les instances de son sport à la dimension d'éco-responsabilité. Dans ce registre, il réfléchit notamment à la conception d'une balle fabriquée à partir de matières recyclées et elle-même recyclable. Actuellement, cette gestion des déchets n'est pas anecdotique. Les sociétés de balle pelote consomment en effet environ 12 000 balles par an, ce qui équivaut à 600 kilos de matière plastique non recyclée.

Comme nous avons essayé de le démontrer dans l'introduction de ce dossier, la communauté concernée par la balle pelote est extrêmement riche et plurielle. Les nombreuses manifestations de soutien et consentement appuyant cette candidature témoignent de cette diversité. Elles émanent de joueurs, dirigeants de société, dirigeants fédéraux, arbitres et simples amateurs.

La balle pelote réunit plus de 3000 joueurs sur le territoire de la FW-B et témoigne d’un profond enracinement communautaire. A la fois, jeu traditionnel, sport à part entière et patrimoine culturel vivant, la balle pelote combine ces trois dimensions. Des actions de sauvegarde concrètes sont mises en place aujourd’hui et sont prévues dans le futur pour réduire l’érosion de la pratique (sensibilisation dans les écoles, action de communication, programmation de compétitions dans des lieux publics à forte visibilité). Ces initiatives permettent à la balle pelote de croire en son avenir.

La reconnaissance de la Fédération Wallonie-Bruxelles permet de mettre en lumière les initaitives prises pour péréniser ce riche patrimoine.

Une bibliographie complète est accessible dans le DOSSIER COMPLET ci-contre

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Contact

Benoît Goffin

historien, auteur de plusieurs publications consacrées aux aspects socioculturels et patrimoniaux du jeu de balle.

Conservateur du Musée des jeux de paume d'Ath

+32 (0)497 30 54 29


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