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Fiche



Joie, humour, partage et solidarité font du Grand Feu de Barbençon un événement festif incontournable, célébré le dimanche suivant le Mardi Gras.Outre le bûcher allumé en soirée, un char est tiré par des « saqueux » (ceux qui tirent en wallon) pour l'emmener en haut du village. Les tentatives des homme mariés, les « astoqueux », pour l'empêcher de remonter la pente sont mises à mal par les « destoqueux », de jeunes et robustes célibataires.

Le Grand Feu de Barbençon

Toutes les informations sur Grand Feu de Barbençon

Localisation :

Ancienne commune de Barbençon, entité de Beaumont, province du Hainaut

Communauté concernée :

  • Le Comité de la « Jeunesse de Barbençon »
  • Les habitants de Barbençon ainsi que toutes les personnes assistant au Grand feu
  • L’école maternelle et primaire de Barbençon
  • L’administration communale de Beaumont

Société ou groupe responsable :

Le Comité de la « Jeunesse de Barbençon »

Depuis toujours, le Grand Feu de Barbençon est célébré le dimanche qui suit le Mardi Gras, 1er dimanche de la Quadragésime.

Parmi tous les grands feux célébrés dans la région, le Grand Feu de Barbençon est une tradition tout à fait spécifique car il ne s’agit pas seulement d’un bûcher allumé le soir.

En effet, il s’agit d’une fête dont sa spécificité est tout à fait locale, et nulle part ailleurs, dans tous les autres grands feux, ce genre de spectacle n’existe ou n’existe plus. Les préparatifs sont beaucoup plus longs et précèdent le jour même de la fête comme la confection du bonhomme-hiver, la confection d’un gros tas de bois et paille qui sera complété le jour du Grand Feu en matinée par un dernier ramassage de bois et paille.

Le Grand Feu de Barbençon a ses propres caractéristiques. Un char aux roues en bois cerclées de fer et muni d’une longue chaîne est tiré par les jeunes, les « saqueux », terme wallon voulant dire ceux qui tirent.

Ils doivent emmener le char en haut du village. Mais pour l’empêcher d’avancer, les hommes mariés, les « astoqueux » sont là pour placer de grosses cales de bois serties au bout d’un manche sous les roues. Et ce n’est pas fini car pour débloquer ces grosses cales arrivent les « destoqueux », de jeunes et robustes célibataires qui ont pour mission de faire glisser les « astoques » avec leurs « destoques », longues perches de bois confectionnées dans les semaines qui précèdent le Grand Feu.

Inutile de dire que les « astoqueux » ne parviendront pas à empêcher le char de remonter la pente. L’hiver sera vaincu et le bonhomme sera brûlé le soir même. Ce sont les derniers mariés du village qui bouteront le feu au bûcher.

Le public qui assiste porte des déguisement divers. Par exemple, le groupe des infirmiers qui suit le cortège procéde à de fausses transfusions, etc.

La tradition se passe dans la langue wallonne propre à notre région et aussi particulière au niveau local dans les mots employés afin de véhiculer certains termes et expressions spécifiques à cette manifestation. Quand les personnes se présentent, elles disent, de façon théâtrale, un mot en wallon. Combien de fois n’entendons-nous pas des « saqué, ho hisse, i faut el fais monter ! »

  • Pratiques sociales, fêtes
  • Traditions orales

Le Grand Feu de Barbençon est toujours bien vivace et suivi par les gens de la région, voire de plus loin, car outre le « grand feu » à 20h qui est une coutume ancrée en Entre Sambre-et-Meuse, le spectacle offert la journée avec le char qui doit remonter le village est particulier.

Le Grand Feu fait partie de la « culture » des Barbençonnais de toutes les générations qui participent grandement à cet évènement annuel. Il anime toujours autant la population de Barbençon soucieuse de conserver son folklore et de le transmette aux générations futures. La transmission se fait oralement au niveau du cercle familial mais également au sein de l’école communale de Barbençon. Cette dernière contribue aussi aux préparatifs de cet évènement avec ses élèves et ce, sous la direction du comité de la jeunesse locale.

Toutes les générations participent à cet évènement. Les enfants de Barbençon sont les premiers acteurs locaux. Ils sont un peu les rois de la fête. Ils sont souvent présents pour assister à la confection du bonhomme hiver, ce qui est impressionnant pour les plus petits.

Les enfants se mobilisent sous le regard de leurs parents et souvent leur aide pour faire partie de la « chaîne » tirant le char avec ses roues en bois sur lequel est installé «el Bollomme* » hiver ! (* langue locale).

Le comité de la jeunesse prépare le feu et le bonhomme hiver en passant durant quelques semaines avant la date fatidique chez tous les villageois pour récolter des fagots ou coupes de branches qui vont constituer le bûcher.

Les astoqueux et les destoqueux - et pour en être un de ceux-ci il faut du muscle - sont des adultes et des jeunes pas toujours de même génération et parfois leur rôle se transmet au sein de la famille de père en fils, le père qui astoque se livrant à un combat avec son fils ou beau-fils !

Le Grand Feu de Barbençon n’est actuellement pas menacé de disparition. Néanmoins l’engouement devient un peu moins important. Les conditions climatiques influencent également le nombre de participants.

Cette tradition a toujours été respectée et, de génération en génération, le rite se perpétue. D’ailleurs, une vague d’intérêt s’est bien remise et ceci peut s’expliquer par ces motifs :

  • l’association de l’école locale pour la transmission de la tradition ;
  • l’attribution du label « Barbençon, un des plus beaux villages de Wallonie » en avril 2016 ;
  • le tournage d’une partie de l’émission de la RTBF « Les Ambassadeurs » fin août 2016 avec comme thème central pour Barbençon une mini-reconstitution du Grand Feu et principalement une activité toujours appréciée par les enfants des écoles qui consiste à fabriquer un bonhomme hiver en paille.
  • l’intérêt annuel de la presse écrite et télévisée pour le Grand Feu de Barbençon, depuis de nombreuses années. Déjà en 1979, la RTBF CHARLEROI venait tourner un film sur le Grand Feu de Barbençon afin de le présenter au « Festival du film folklorique » de Nice. Entre-temps, d’autres petits films ont été tournés, notamment par Télésambre. La presse écrite relaie aussi l’événement avant et après par de nombreux articles qui sont annexés dans le dossier général.

Il faut aussi savoir que la population du village de Barbençon a fortement augmenté, passant de 500 à la fin des années 60 à presque 900 en 2017.

L’origine de cet évenement étant très lointaine, depuis plusieurs siècles, au point de ne pas pouvoir réellement dater ses débuts, il est important de garder vivante cette mémoire collective et identitaire. C’est pourquoi, la contribution de l’école communale au maintien de cette tradition en l’inscrivant dans son programme pédagogique est essentielle.

Comme décrit plus haut, les trois journées préalables au grand feu sont disparues avec le temps. Les prépartifs font aujourd’hui partie de la tradtion :

  •  le ramassage des fagots chez les villageois de Barbençon
  • le ramassage de paille chez les agriculteurs
  • la confection du bonhomme hiver (salopette, paille, bottes en caoutchouc, masque, gants, …)

L’allumage du feu est toujours fait par les derniers jeunes mariés du village précédant le grand feu.

La « langue wallonne » est également présente dans cette tradition vu l’appellation wallonne des acteurs du Grand Feu, des autres termes purment wallon pour en parler.

La reconnaissance récente en 2016 du village de Barbençon comme « Un des plus beaux villages de Wallonie » va contribuer également à relancer l’intérêt des villageois et des autres villages pour le Grand Feu.

D’ailleurs, le Grand Feu, tradition rurale et originale, a contribué en partie à cette reconnaissance comme « Un des plus beaux villages de Wallonie ». Cette dernière reconnaissance a un impact très positif au sein de la population qui « redécouvre » en quelque sorte son village et l’intérêt de sa conservation auquel est indéniablement attaché leur original folklore.

Le Grand feu est une fête d’un jour où tous les villageois mais aussi ceux de l’entité de Beaumont se trouvent réunis dans un grand moment festif empreint de joie, d'humour, de partage et solidarité. Les enfants y tiennent désormais un rôle primordial et sont encouragés par tous les villageois afin qu’ils arrivent à mener le bonhomme-hiver sur le bûcher appelé le Grand Feu et sonner ainsi la fin de l’hiver. Bien que très ancien, le grand feu est toujours bien vivant et se transmet avec ardeur et passion de génération en génération. C’est un socle commun pour tout le village qui est très fier de ce folklore très original et particulier dans son déroulement. Mais le Grand Feu n’est pas qu’une manifestation d’un jour. La préparation se fait quelques semaines à l’avance, et la tradition persiste depuis longtemps.

  • La population locale attend le passage des ramasseurs de bois ;
  • C’est l’occasion de revoir cette équipe de jeunes qui ramassent tout le bois, même actuellement les sapins de Noël, pour la confection du tas ou bûcher qui verra le bonhomme hiver partir en fumée. C’est aussi l’occasion de boire une tasse de café « amélioré ».
  • Le jour du Grand Feu cette même récolte à plus petite échelle se réalise en matinée après une bonne omelette. Car la récolte risque d’être très dure !

C’est avant toute chose un évènement intergénérationnel où toutes les couches sociales se retrouvent sur un même pied d’égalité. Il contribue ainsi à la cohésion sociale de même qu’à l’intégration des nouveaux habitants. Au-delà du cortège du Grand Feu, c’est l’occasion pour les familles et amis de se retrouver en s’invitant mutuellement. La danse des sept sauts qui clôture la journée autour du Grand Feu sur lequel brûle Bonhomme hiver est une sorte de grande farandole rassemblant tous les villageois.

Dialogue intergénérationnel

Cette manifestation a bien un caractère intergénérationnel :

  • le ramassage de bois et paille, avant et le jour même du Grand Feu est l’occasion est d’une sympathique entrevue entre les « acteurs » et les « fournisseurs » ;
  • la « cagnotte » que les jeunes constituent pour organiser l’événement est bien entendu un événement. Autrefois, on passait avec un cahier de maison en maison afin de récolter de l’argent. On y inscrivait le montant, le donateur et une petite signature. Le système fut abandonné il y a une cinquantaine d’années car les « curieux » aimaient bien de voir ce que le voisin avait donné. Aujourd’hui, la récolte de fonds se fait grâce à plusieurs « cochons-tirelires » qui circulent de maison en maison.
  • les gains récoltés serviront, entre autres, à offrir avant Noël un « cougnou » aux personnes de plus de 60 ans. Cela est donc une occasion de plus de rencontrer la population.

Dialogue multiculturel

La manifestation est ouverte à tous les participants volontaires et celle-ci est teintée de rites différemment expliqués mais dont la population n’est pas consciente car ce jour-là doit être un excellent moment de convivialité commençant par un rude combat « théâtral », une sorte de « mise en scène » qui se termine toujours par un rondeau autour du feu final.

A Barbençon, il n’y a pas vraiment la présence de plusieurs communautés. Mais la participation de l’école assure et favorise l’intégration des enfants issus de communautés différentes. La constitution de masques et déguisements à l’école invite tous les enfants à y participer.

Développement durable (environnement, santé, économie inclusive, etc.)

Le Grand Feu a peu d’incidences sur l’environnement, ni sur la santé. Le char en bois est tiré par les enfants et les adolescents. Cet évenement a un impact positif sur l’économie locale, notamment pour les cafés et restaurants du village.

Diversité et créativité humaine

  • Pour les travaux de maintenance et de réparations du char avec ses roues en bois, il faut faire appel au savoir-faire d’artisans ferronniers et de menuisiers à l’ancienne. Ce qui devient rare car la technique relève d’une connaissance technique pointue de chauffe du cerclage des roues suivi d’un refroidissement rapide afin que le cerclage emprisonne fortement le bois.
  • Chaque année aussi, il faut tricoter des bonnets aux couleurs de Barbençon (rouge et jaune) ainsi que l’écharpe aux mêmes couleurs que portera le bonhomme-hiver.
  • La confection du bonhomme-hiver et des costumes demandent un savoir-faire et fait appel à la créativité de tout un chacun. En conclusion, chacun apporte sa contribution à l’édifice.
  • Les élèves de l’école créent des masques et des déguisements.

Cette deuxième reconnaissance qui suit celle de « un des plus beaux villages de Wallonie » contribue à renforcer davantage la pérennité de ce folklore, de cette tradition, de ce patrimoine oral. Barbençon ne veut pas devenir un village dortoir. Un village sans culture et tradition est un village qui se meurt. Cette reconnaissance peut également contribuer à l’attractivité touristique.

Références bibliographiques :

A. Doppagne, « Les grands feux », coll. Wallonie, art et histoire, n° 11, Gembloux et Namur, 1972.

Roger Pinon, « Analyse morphologique des Feux de Carême dans la Wallonie occidentale », Commission royale belge de Folklore, annuaire n° XIII, 1959-1960, Bruxelles, 1962, pp. 81-183.

Lempereur Françoise, « Du Doudou au Remoudou », Labor-RTBF, 1999.

Vidéo :

R. Pinon, Le grand feu de Barbençon, Musée de la Vie wallonne, 6 mars 1960.

Télécharger le dossier (pdf)

42-2022-Grand_Feu_DOSSIER_COMPLET.pdf Image de couverture du document

Contact

Luc Gérin. Président du Comité de la « Jeunesse de Barbençon »


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