Les caractères de l’alphabet tactile conçu par Louis Braille se présentent sous la forme de petits rectangles divisés en deux colonnes de trois points, disposés à la façon d’un domino. Cette disposition permet 64 combinaisons possibles. En mettant de côté l’absence totale de points – qui ne signifie rien – on obtient 63 signes différents. C’est suffisant pour représenter la totalité des lettres de l’alphabet, la ponctuation, les lettres accentuées, les chiffres et les signes algébriques, ainsi que la notation musicale. Le génie de Louis Braille réside essentiellement dans le fait que le rectangle de six points tombe parfaitement sous la partie la plus sensible du doigt. La vitesse de lecture est nettement plus efficace et rapide qu’avec d’autres systèmes tactiles élaborés avant Braille ou à son époque, dont beaucoup se fondaient sur des caractères romains mis en relief.
En 1825, Louis Braille n’avait que 16 ans lorsque l’Institut Royal des Jeunes Aveugles (IRJA) lui reconnait la pertinence de cette écriture alternative. En 1836, son usage et son enseignement se déploient en Belgique.
Le braille a donné la possibilité de lire et surtout d’écrire aux personnes qui en étaient jusqu’alors empêchés par leur cécité ou leur déficience visuelle. Cette écriture tactile témoigne d’une intelligence de la main caractéristique d’un savoir et d’un savoir-faire. Son usage a transformé le destin de la communauté des personnes aveugles et mal-voyantes en lui permettant un accès direct à l’écrit. Son principe de codage, aujourd’hui universel, représente l’aboutissement de siècles de recherches dans le domaine de l’éducation des personnes aveugles.
Depuis quelques décennies déjà, des voix s’élèvent pour mettre en garde contre un déclin de l’enseignement et de la pratique du braille. Paradoxalement, c’est le progrès qui en est la cause. L’amélioration constante des systèmes de synthèse vocale et des supports audio favorisent nettement la lecture auditive, qui demande moins d’efforts que la lecture en braille. Ces évolutions touchent aussi les transcripteurs braille, concurrencés par les nouvelles technologies.
Important outil d’intégration sociale
Ces dispositifs audios sont pertinents et complémentaires mais ne rendent pas pour autant rendre le Braille obsolète.
L’un des atouts du braille réside dans le fait qu’il permet de transcrire l’intégralité du texte, avec toutes ses caractéristiques : orthographe, ponctuation, caractères spéciaux, minuscules et majuscules, soulignés et italiques, disposition des titres et des paragraphes, etc., sans oublier les formules mathématiques et scientifiques ou les notes de musique, que les synthèses vocales sont incapables de déchiffrer. Lire un texte en braille donne accès à l’écrit dans toute sa richesse et sans intermédiaire. L’avantage de l’écrit sur l’oral est de permettre de mieux fixer la connaissance, d’organiser sa pensée, de mémoriser l’information.
De plus, en raison du coût élevé de certaines technologies audios, le braille « papier » conserve toute sa pertinence en tant que support bon marché et insensible aux pannes qui peuvent affecter les supports électroniques.
L’année 2025 marque le bicentenaire de la création du braille. Une sensibilisation particulière sera donc faite cette année pour promouvoir l’importance de l’apprentissage du braille tant auprès du public mal-voyant, dès l’enfance, qu’au public valide. Par exemple, un concours de dictée en braille, sur le modèle de « la dictée de Bernard Pivot », sera mise en place dans toute la francophonie.
La pratique du braille offre un puissant levier d’intégration sociale comme peuvent l’être tous les moyens d’accès à la culture. Par exemple, avec le braille dit « musical », un musicien aveugle pourra accéder au statut de compositeur. Les données sociologiques nous rapportent que si un déficient visuel sur deux est sans emploi, 75% de ceux qui travaillent ont la maitrise du braille. « L’apprentissage et l’usage du braille » constitue, ainsi, un véritable patrimoine vivant qui répond à d’importants enjeux sociétaux par l’accès à la connaissance et à la culture dans un monde en mutation permanente.
- Vous trouverez plus d’informations sur la reconnaissance de "L'apprentissage et l'usage du braille" sur l'inventaire du patrimoine immatériel
En guise d’illustration, voici deux images qui illustrent le patrimoine vivant du braille :
- La braille box, outil de sensibilisation au braille utilisée notamment dans les écoles
- Le Manneken Pis rend hommage à Louis Braille